SCI - Peut-on prouver une cession de parts sociales ...

lorsque le cédant n’a pas signé l’acte de cession ?

Prouver une cession de part sans signature

Le Code Civil, qui encadre les dispositions applicables aux sociétés civiles, prévoit aux articles 1861 et suivants, le régime juridique de la cession des parts sociales : Agrément des associés, notification du projet de cession, saisine d’un expert pour valorisation (1843-4 du C.Civil ), droit de repentir de l’associé cédant, nantissement…

Plus précisément :

La cession de parts sociales de sociétés civiles doit être constatée par écrit (Art 1865).

Un dossier de formalité doit être déposé auprès du tribunal de commerce pour mettre à jour la liste des associés avec la répartition exacte du capital social post-cession.

Arrêt de la Cour de cassation du 4 juillet 2024 (Cass. 3e civ., n° 23-10.534)

Au cas d’espèce, trois associés constituent une SCI avec pour objectif l’acquisition d’un local commercial.

Quelques années plus tard ...

La totalité des parts sociales sont cédées pour 2000 euros au profit de deux acquéreurs : 1% pour une personne physique, 99% par une autre SCI.

Un acte de cession est enregistré et déposé au greffe du tribunal de commerce.

Quelques mois plus tard ...

L’actif immobilier de la SCI est vendu pour 1 million d’euros ….

La différence entre la valeur de 100% du capital de la SCI, et finalement de son actif cédé un an plus tard est abyssale.

Le contentieux prend son origine dans la contestation, par l’un des associés fondateurs, de sa signature sur l’acte de cession.

La saisine d’un expert judiciaire graphologue le confirme, il ne pouvait être tenu comme l’auteur de la signature et la mention apposée sur l’acte de cession litigieux puisque ce n’est pas sa signature.

Il assigne les deux acquéreurs en indemnisation de son préjudice.

L’associé fondateur à l’origine de l’acte introductif d’instance se voit débouté par les juges du fonds

Lesquels considèrent que l’exigence d’un écrit constatant la cession de parts sociales n’est pas une condition de validité de la cession, valablement formée par l’échange de consentements.

Mécontent, le demandeur se pourvoit en cassation, mais une nouvelle fois les juges de la Haute Cour rejettent son argumentaire.

En réalité, même s’il appert qu’il n’avait pas signé lui-même l’acte de cession litigieux, la Cour de cassation s’est fondée sur une attestation postérieure à la cession, laquelle faisait expressément mention de la cession de ses parts sociales, certifiant par ailleurs le rachat de son propre compte courant.

Droits des affaires Maitre Catoire

Le dispositif rappelle :

Grâce à un faisceau d’indices, les juges ont entériné l’existence de la cession de parts sociales puisque :

  • Une attestation, signée par le demandeur à l’action, faisait état de la cession, et le rachat de son propre compte courant.
  • Cette attestation a été signée sous contrôle d’un fonctionnaire municipal lequel avait vérifié la carte d’identité du signataire.
  • L’associé fondateur s’est désintéressé pendant plusieurs années de la vie de la société, sans s’offusquer de l’absence de convocation aux assemblées générales, et de ne recevoir aucunes informations sur la vie sociale.

L’argument selon lequel « la fraude corrompt tout » n’a pas trouvé écho dans l’oreille des juges suprêmes, lesquels ont appuyé la décision de leurs collègues de la Cour d’appel.

Même si l’acte de cession litigieux a bien été écarté, les autres indices ont permis de considérer que la cession de parts sociales avait bien eu lieu.

Il appartient alors à celui qui se prévaut d’une cession de parts sociales contestée, de rapporter la preuve de l’existence d’un accord sur la réalité de l’acte.

Si la question de la signature, certifiée par un fonctionnaire municipale est difficilement contestable, il est également reproché à l’associé demandeur de pas s’être intéressé à la société pendant plusieurs années après la cession contestée.

Il conteste avoir cédé ses parts en 2009, mais il se serait rendu compte qu’il n’était plus associé de la SCI, seulement en 2014 soit 6 ans après ?

Lorsque vous êtes associés d’une société, vous devez vous intéresser, récolter des informations auxquelles vous avez droit, et vérifier que vous êtes convoqués chaque année pour l’approbation des comptes de la société.

Dans chaque société, il faut au moins une assemblée générale par an.

Pour mémoire, s’agissant des SCI, le code civil prévoit :

  • Le droit d’obtenir au moins une fois par an, communication des livres et documents sociaux

  • Le droit de poser par écrit des questions sur la gestion sociale. Le gérant devra y répondre dans un délai d’un mois.

  • Le droit d’obtenir la reddition des comptes, c’est-à-dire d’être convoqués en assemblée générale (au moins une fois par an), pour que les gérants rendent compte de leur gestion.

Simultanément, vous devez recevoir un rapport écrit sur l’ensemble de l’activité de la société au cours de l’exercice écoulé comportant l’indication des bénéfices réalisés / prévisibles, et des pertes encourues / prévues.

Les comptes n’ont pas à être déposés et publiés auprès du greffe du tribunal de commerce comme dans les sociétés commerciales, mais ces assemblées doivent tout de même être convoquées pour tenir les associés informés.

Vos statuts ou pactes d’associés peuvent vous attribuer des droits supplémentaires, pensez à vérifier.

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